Gynecologie

La Pré-éclampsie: Signes, Traitement Et Complications

L’HTA pendant la grossesse concerne 10% des grossesses. 2 à 5% sont des HTA chroniques (La Pré-éclampsie). Il s’agit d’une des 1ère cause de mortalité périnatale. L’HTA se définit par des chiffres tensionnels élevés : PAs > 140 mmHg et/ou PAd > 90 mmHg .

Les complications sévères de l’hypertension artérielle sont la 2ème cause de mortalité maternelle.(selon l’OMS) Ces décès sont jugés évitables dans 65% des cas .

La prise en charge de cette pathologie nécessite une approche multidisciplinaire.

La Pré-éclampsie: DÉFINITION

La Pré-éclampsie chez une femme non hypertendue avant la grossesse : apparition au delà de la 20e semaine d’aménorrhée d’une HTA avec PAS > 140 mmHg ou PAD > 90 mmHg associée à une protéinurie supérieure à 300 mg/j

  • chez une femme hypertendue connue : apparition d’une protéinurie supérieure à 300 mg/j au-delà de la 20e semaine d’aménorrhée (protéinurie absente avant ce terme)
  • Prévalence : 5 à 6% des grossesses
  • La terminologie « toxémie gravidique » est abandonnée

Classification des pathologies hypertensives de la grossesse

L’HTA est le principal signe d’un ensemble de maladies que l’on regroupe sous le nom de syndromes vasculo-rénaux de la grossesse.

Ces syndromes sont caractérisés par :

  • sur le plan maternel :
    • 3 signes cliniques : oedèmes pathologiques, HTA, protéinurie
    • 2 complications aiguës principales: éclampsie, HRP
  • sur le plan foetal par la souffrance foetale chronique.

La classification des pathologies hypertensives de la grossesse la plus employée actuellement est celle de l’American College of Obstetricians and Gynecologists qui distingue 4 grands cadres nosologiques :

  • HTA chronique
  • HTA gestationnelle ou transitoire
  • Préeclampsie (PE)
  • Préeclampsie surajoutée

1. HTA chronique (préexistante)

  • 2 à 5% des grosses
  • Elle est préexistante à la grossesse ou découverte < 20 SA
  • quelle que soit sa cause (essentielle ou secondaire)
  • l’implantation placentaire est le plus souvent normale (≠ prééclampsie)

2. L’hypertension Artérielle Gravidique

  • HTA gestationnelle = transitoire = tardive
  • L’hypertension artérielle isolée en fin de grossesse ou dans le post-partum immédiat avec normalisation des chiffres tensionnels après l’accouchement (dans les 10 jours du post-partum).
  • Il n’y a pas de protéinurie +++
  • Pas de surrisque majeur (mère et enfant)
  • Attention : se méfier des formes de début de la PE avant l’apparition de la protéinurie (surveiller la protéinurie !)

3. Prééclampsie pure = toxémie gravidique

  • Cette pathologie associé par définition : HTA + Protéinurie significative (>0,3g/24h)
  • après 20 semaines (en général au 3ème trimestre),
  • Il s’agit d’une affection propre à la grossesse qui affecte 5 à 10% des grossesses
  • Guérison sans séquelle avec la fin de la grossesse
  • C’est une maladie de l’implantation placentaire

4. Prééclampsie surajoutée (à une HTA chronique ou à une néphropathie)

  • HTA chronique avec apparition d’une PU ≥ 0,3 g/24h en cours de grossesse ou Néphropathie chronique avec apparition d’une HTA surajoutée
  • Risque materno-foetal majeur ++ (> PE pure)
  • <> 25% des grossesses avec HTA

SIGNES DE LA PRE-ECLAMPSIE

La définition classique associait 2 des 3 signes suivants : oedèmes, HTA, protéinurie, chez une femme indemne d’affection hypertensive ou de néphropathie.

Actuellement, la PE se définit par l’association protéinurie et HTA, indépendamment de la présence d’oedèmes.

LES TROIS SIGNES CLINIQUES De LA PRE-ECLAMPSIE.

1°) Les oedèmes.

Normalement, des oedèmes existent au cours de la grossesse :

  • au niveau des membres inférieurs, 3 fois sur 4.
  • au niveau des membres supérieurs, voire généralisés, dans 20 à 25 %. Sont pathologiques des oedèmes apparus brutalement, ou qui s’aggravent brutalement. Ces oedèmes pathologiques modifient la courbe pondérale (axe d’homéostasie pondérale). Ils ne sont qu’un signe de la maladie.

2°) L’hypertension artérielle.

Les conditions de mesure de la tension artérielle doivent être strictement respectées : au bras droit, en position assise et après 10 minutes de repos au moins, avec un brassard de dimensions convenables. Le minimum est parfois difficile, voire impossible à apprécier à l’auscultation. La tension artérielle ne doit pas être prise en décubitus dorsal : dans cette position, des phénomènes de posture peuvent entraîner un pincement de la tension artérielle (syndrome hypotensif de décubitus).

Normalement la grossesse diminue les chiffres tensionnels de 10 à 20 mmHg. Cette hypotension relative apparaît tôt, et tend à disparaître en fin de grossesse. La tension artérielle conserve pendant la grossesse, son rythme nycthéméral : la tension artérielle est moins élevée la nuit.

La tension artérielle est anormale lorsque :

  • la systolique est supérieure ou égale à 140 mmHg,
  • et/ou lorsque la diastolique est supérieure ou égale à 90 mm Hg.

Dans les toxémies, indépendamment des chiffres tensionnels, on note une inversion du rythme nycthéméral de la tension : celle-ci est souvent plus élevée la nuit. Par ailleurs, surtout dans les formes sévères, existe une instabilité : cette instabilité est parfois de 20 à 40 mmHg pour la maxima, de 15 à 30 pour la minima.

3°) La protéinurie.

  • Elle est dépistable au labstix : si une protéinurie est présente, il faut réaliser un dosage sur les urines de 24 H. Le test n’est pas interprétable si le pH urinaire est alcalin.
  • Si la protéinurie égale ou dépasse 0,30 g/24 h c’est pathologique. Une protéinurie discrète, moins importante que ce chiffre, peut être due à une augmentation de la filtration glomérulaire physiologique ou à une contamination de l’urine par des leucorrhées.
  • Toute protéinurie doit faire rechercher une infection urinaire.

CONTEXTE DE LA PRE-ECLAMPSIE

Terrain:

  • Facteurs génétiques
  • Primiparité
  • Obésité
  • Age maternel élevé
  • Anasarque foetal…

Traitement usuel

  • Clonidine éventuellement complétée de nicardipine ou labétalol
  • Antécédents
  • Pré-éclampsie, éclampsie (la patiente, sa mère ou une soeur)
  • Pathologies maternelles :
    • ATCD de dysgravidie
    • insulino-résistance
    • thrombophilies
    • affections auto-immunes
    • HTA
    • néphropathies chroniques

Facteurs de risque de La Pré-éclampsie

  • Primiparité
  • Brève période d’exposition préalable au sperme du père
  • Intervalle long entre deux grossesses
  • Grossesse multiple
  • Vie en altitude
  • Stress physique ou psychologique
  • Pathologies foetales : anomalies congénitales ou chromosomiques, anasarque
  • Age > 40 ans

Circonstances de survenue de la Pré-éclampsie

  • Pathologie maternelle d’origine placentaire (notamment défaut d’invasion trophoblastique en début de grossesse)

La Pré-éclampsie: EXAMEN CLINIQUE

  • Protéinurie (> 300 mg/j) avec HTA gravidique (PAS > 140 mmHg ou PAD > 90 mmHg).
  • Pré-éclampsie sévère si PAS > 160 mmHg ou PAD > 110 mmHg ou atteinte viscérale (notamment le syndrome HELLP)
  • Oedèmes
  • Prise de poids
  • Recherche de signes évocateurs d’une forme sévère annonciatrice d’éclampsie :
    • céphalées intenses, frontales ou en casque
    • somnolence, obnubilation
    • troubles sensoriels : phosphènes, acouphènes, baisse d’acuité visuelle, amaurose transitoire
    • barre épigastrique ou signe de Chaussier
    • nausées, vomissements

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

  • Protéinurie (> 300 mg/j ou 2+)

Signes paracliniques

BIOLOGIQUE

  • NFS, Plaquettes
  • Ionogramme sanguin, urée et créatininémie
  • Uricémie
  • Hémostase : TP, TCA et fibrinogène
  • Bilan hépatique
  • ECBU et protéinurie des 24 heures
  • Formes simples :
    • protéinurie > 300 mg/j
    • uricémie > 350 µg/L
    • transaminases augmentées
    • plaquettes < 150 G/L
  • Formes sévères :
    • protéinurie > 3,5 g/j
    • transaminases très élevées (x 3)
    • plaquettes < 100 G/L
    • créatininémie > 100 µmol/L
    • diurèse < 20 mL/h
    • hémolyse
    • CIVD

IMAGERIE

Evaluation de la vitalité foetale

  • Cardiotocographie à la recherche d’une souffrance foetale.
  • Echographie obstétricale pour apprécier la croissance foetale (biométrie), le « bien être foetal » (score de Manning) et évaluer la quantité de liquide amniotique
  • Doppler obstétrical permet la mesure des flux sanguins évaluant la circulation foetale et placentaire

TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER de La Pré-éclampsie

Stabilisation initiale

  • Remplissage vasculaire : Ringer-lactate 300 à 500 mL en 30 min (pas d’albumine) avant le traitement antihypertenseur
  • Antihypertenseurs intraveineux pour maintenir une PAD entre 90 et 105 mmHg et une PAM entre 105 et 125 mmHg :
  • Installation de la patiente en décubitus latéral préférentiellement gauche
  • Oxygénation simple au masque facial (formes sévères)
  • En cas de pré-éclampsie sévère, la prévention de l’éclampsie par le sulfate de magnésium est recommandée devant l’apparition de signes neurologiques (céphalées, troubles visuels, ROT polycinétiques) : bolus IV de 4 g puis 1 g/h IVSE
  • En fonction du terme de la grossesse, une corticothérapie pour la maturation pulmonaire foetale doit être envisagée

Suivi du traitement

  • Risque d’OAP en post-partum donc restriction hydrique et diurétiques

Surveillance

CLINIQUE

  • Détection des signes annonciateurs d’une éclampsie (douleur épigastrique violente, nausées, phosphènes, acouphènes) :
    • surveillance PA, FC
    • surveillance FR et examen neurologique si patiente sous sulfate de magnésium
    • et aussi surveillance de la vitalité foetale
    • selon les valeurs de la PA : objectif PAM = 105 à 125 mmHg

PARACLINIQUE

  • NFS, coagulation, hémolyse, albumine, uricémie, transaminases, vitalité foetale

La Pré-éclampsie: Mécanisme / description

  • Le mécanisme n’est pas clair : c’est une pathologie maternelle d’origine placentaire (notamment défaut d’invasion trophoblastique en début de grossesse)
  • L’HTA est un symptôme d’une maladie et non sa cause, c’est un moyen d’adaptation de l’organisme maternel pour maintenir un débit utéro-placentaire correct. Le traitement antihypertenseur diminue le risque de complications maternelles mais modifie peu le pronostic foetal

La Pré-éclampsie: PRONOSTIC / EVOLUTION

1°) Risques foetaux La Pré-éclampsie:

Le retentissement foetal n’est pas corrélé à la gravité de la pathologie maternelle.

a – La souffrance foetale chronique.

Le foetus court, dans tous les syndromes vasculo-rénaux, un risque de souffrance foetale chronique et de retard de croissance, par perturbation des échanges foeto-placentaires.

D’où :

1 – Une femme qui présente une néphropathie chronique, une hypertension chronique, ou des antécédents de toxémie, doit être surveillée étroitement. Une toxémie surajoutée est souvent grave car le retentissement foetal en est sévère. Par définition, on parle de toxémie surajoutée :

  • s’il y a une élévation des chiffres tensionnels de 30 mm pour la systolique ou de 15 mm pour la diastolique.
  • s’il y a apparition d’une protéinurie (dans les cas d’hypertension artérielle chronique).
  • le dépistage de la toxémie surajoutée est aidé par la surveillance biologique des patientes à risque : élévation de l’acide urique, petits troubles de la coagulation (élévation du VIII R:AG), l’apparition d’une hémoconcentration. Les modifications biologiques, notamment l’élévation du VIII R:AG, peuvent précéder les signes cliniques maternels.

2 – Lorsque la toxémie est suspectée, la grossesse doit être surveillée très étroitement. La maladie peut évoluer vite : on peut en une semaine passer de l’hypertension artérielle gravidique à la toxémie sévère, voire à l’éclampsie. De plus, sur le plan foetal, la souffrance foetale chronique peut se compliquer rapidement de souffrance foetale subaiguë, puis aiguë, et de mort foetale.

3 – L’HTA n’est qu’un des signes de la maladie. La maladie commence avant que les signes maternels n’apparaissent. De nombreux arguments font penser que la maladie peut commencer vers 16-18 SA, lorsque se met en place le dispositif vasculaire définitif destiné au placenta (colonisation des artères spiralées destinées au placenta, par du trophoblaste).

3 – Comme dans tous les cas de souffrance foetale chronique, il existe un risque de prématurité et de MFIU

b – La souffrance foetale subaiguë.

Le trouble des échanges foeto-maternels explique le retard de croissance intra-utérin. Si ce trouble s’aggrave, les échanges gazeux peuvent être compromis, et une hypoxie et une acidose foetale vont apparaître ; avec peut-être des risques de lésions cérébrales : ceci justifie la surveillance très étroite de l’état foetal au cours de la grossesse, car l’acutisation s’annonce par des anomalies du RCF ou du comportement foetal, par des anomalies du doppler ombilical ; en extrayant l’enfant devant ces anomalies, on préserve au mieux son avenir neurologique.

2°) Risques maternels de La Pré-éclampsie.

– Une HTA sévère met en danger la vie de la mère.

complications potentielles de l’HTA sévère : OAP, AVC, I rénale A,

La cause de mort la plus fréquente dans les éclampsies est l’hémorragie intra-cérébrale.

Le risque est important si la PAM > 140 mm Hg ? traitement parentéral en urgence

– Deux complications évolutives feront par ailleurs courir à la mère des risques propres :

l’éclampsie et l’hématome rétro-placentaire.

Conclusion.

Il n’y a pas de traitement ambulatoire des toxémies gravidiques, pures comme surajoutées. La possibilité d’une évolution rapide grave, pour le foetus comme pour la mère, fait que la femme doit être hospitalisée au moindre doute en milieu spécialisé.

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